Dans son Arrêt C-485/24, la CJUE clarifie la question de la détermination de la loi applicable à un contrat de travail. La décision établit des critères permettant d’identifier la loi applicable en cas de changement du lieu de travail habituel.
L’Affaire C-485/24
L’affaire a commencé en 2002, lorsque la société de transport luxembourgeoise Locatrans a embauché un citoyen français dans le cadre d’un contrat régi par la loi luxembourgeoise.
Il avait été initialement convenu que l’employé travaillerait comme chauffeur dans plusieurs pays européens. Au fil du temps, cependant, l’activité de l’employé s’est progressivement déplacée vers la France. Ce changement a déclenché l’obligation de s’inscrire au système de sécurité sociale français.
Après la cessation du contrat de travail, le chauffeur a intenté une action devant le tribunal du travail de Dijon. Le tribunal du travail de Dijon a rejeté ses demandes. La raison invoquée était qu’après avoir appliqué le droit luxembourgeois, il n’avait trouvé aucune base juridique. La cour d’appel de Dijon est ensuite intervenue. Elle a rejeté la première décision, estimant que le droit français régissait le contrat de travail compte tenu de l’application de la convention de Rome.
À travers une demande de décision préjudicielle, la juridiction française a sollicité l’avis de la Cour de justice. Elle a demandé une interprétation de la Convention de Rome sur la loi applicable aux obligations contractuelles.
Plus précisément, la Cour française a demandé quelle loi s’applique lorsqu’un travailleur, après avoir exercé son activité pendant un certain temps dans un État, transfère son lieu de travail habituel dans un autre État.
La réponse de la Cour européenne
La Cour européenne note tout d’abord que la Convention de Rome envisage trois scénarios :
- La loi applicable peut être choisie par les parties ;
- En l’absence d’un tel choix, la loi du pays où l’employé travaille habituellement régit le contrat ;
- Si ce critère ne peut pas être appliqué, le contrat est régi par la loi du pays où est située l’entreprise qui a embauché le travailleur.
Dans le cas présent, la Cour estime que le critère du lieu de travail habituel ne peut pas s’appliquer, puisque le lieu de travail a changé d’un pays à l’autre.
Donc, le critère applicable dans le cas de Locatrans serait la loi du pays où la société est située, c’est-à-dire le Luxembourg.
Toutefois, la Cour rappelle que les deux critères susmentionnés sont soumis à une limitation. Ils ne s’appliquent pas lorsque les circonstances montrent que le contrat de travail présente des liens plus étroits avec un autre pays. Dans ce cas, c’est la législation de ce dernier pays qui s’applique.
En conclusion, dans l’affaire Locatrans, la Cour invite le tribunal français à déterminer si les circonstances montrent un lien plus étroit avec la France. Tous les éléments caractérisant la relation de travail doivent être pris en considération. Cela signifie que le dernier lieu de travail habituel du salarié et l’obligation de s’inscrire à la sécurité sociale française sont pris en compte.